la Fédération Nationale des Chasseurs (FNC) a été condamnée pour parasitisme à l’encontre de la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) (Jugement 12 février 2021_LPO_FNC ).
En l’espèce, en septembre 2018, la Fédération Nationale des Chasseurs (FNC) a tenté de « redorer son blason » avec une campagne de communication provocatrice sur les murs des métros et panneaux d’affichage dans toute la France où il était possible de lire : « Les chasseurs, 1èrs écologistes de France ? » avec l’imitation des affiches de la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO).
La FNC a alors imité volontairement la communication de l’association écologiste de protection des oiseaux dans le but de s’approprier les valeurs de la LPO et ainsi tromper l’esprit du grand public.
La condamnation de cet acte parasitaire permet à la LPO de voir son préjudice moral réparé. Ironiquement, après le jugement, l’association de sauvegarde de la biodiversité a réalisé des affiches en réponse à celles de la FNC et s’est questionnée à son tour : « Les chasseurs, 1ers parasites de France ? ». https://www.lpo.fr/qui-sommes-nous/espace-presse/communiques/cp-2021/les-chasseurs-condamnes-pour-parasitisme-de-la-lpo
Il convient alors de rappeler :
Les grands principes autour du PARASITISME :
La liberté d’entreprendre, la liberté de commerce, et la libre concurrence sont des principes fondamentaux qui permettent :
- une diversification de l’offre,
- une absence de monopole et
- une compétition saine et stimulante pour les opérateurs économiques.
Toutefois, cette liberté ne peut pas être totale !
Elle est donc assortie de règles à respecter afin de protéger toute personne physique ou morale de la contrefaçon, de la concurrence déloyale ou du parasitisme.
- L’action en contrefaçon sanctionne le non respect d’un droit de propriété intellectuelle reconnu (à savoir le droit d’auteur, le droit des marques, le droit des dessins et modèles…).
Il s’agit d’une action basée sur des articles de lois spécifiques qui sanctionnent la contrefaçon.
- L’action en concurrence déloyale sanctionne des manœuvres déloyales créant un risque de confusion entre deux opérateurs économiques. Le « risque de confusion » est évalué à l’issue d’une comparaison entre les produits concernés et en tenant compte des ressemblances mais aussi des éléments distinctifs et dominants.
Il s’agit d’une action basée sur la responsabilité civile délictuelle : il y a donc un comportement fautif qui a causé un préjudice devant être réparé par celui qui l’a causé.
- Le PARASITISME est une situation de concurrence déloyale particulière.
Qu’est-ce que le parasitisme ?
Un parasite est un « Organisme animal ou végétal qui se nourrit strictement aux dépens d’un organisme hôte d’une espèce différente, de façon permanente ou pendant une phase de son cycle vital. » (Définition Larousse)
Le concurrent agit en « parasite » et vit au dépens de l’autre organisme en tirant indûment profit de son image.
Ainsi, l’acte parasitaire se manifeste par un comportement illégal traduit par la reprise d’éléments ayant contribué au succès d’un organisme afin de profiter de sa notoriété sans bourse délier, donc sans consentir d’efforts.
D’après la jurisprudence constante de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation :
« Le parasitisme économique se définit comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire. »
Comment est sanctionné le parasitisme ?
Le parasitisme est sanctionné comme la concurrence déloyale, sur la base de la responsabilité civile délictuelle.
Cette responsabilité est définie à l’article 1240 du Code civil :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
Il implique alors de réunir trois conditions pour que le parasitisme soit sanctionné :
- Une faute, à savoir un comportement illicite traduit par un acte positif ou une abstention
- Un préjudice, à savoir une atteinte patrimoniale ou extra-patrimoniale qui doit être certaine, directe et personnelle.
- Un lien de causalité entre cette faute et le préjudice.
Un avocat doit démontrer la réunion de ses conditions pour que votre préjudice puisse être réparé.
Le préjudice peut être de différente nature, corporel, matériel ou moral.
Dans les cas de parasitisme, le préjudice sera souvent un préjudice moral qui résulte du trouble commercial provoqué par la pratique parasitaire reprochée au concurrent. Ce trouble commercial peut être actuel ou futur et se manifeste par la dépréciation de la notoriété, de la réputation, du travail de l’organisme qui en est victime.
Des illustrations d’actes de parasitisme ?
Exemple : La commercialisation d’un parfum où la bouteille, le conditionnement, ressemble beaucoup à celui d’une grande marque, de telle sorte qu’il existe entre les deux parfums « un air de famille » (Cass. com. 4/02/2014, n° 13-11.044)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que cette ressemblance n’est pas hasardeuse mais qu’elle résulte de la volonté de reproduire les caractéristiques du parfum renommé afin d’en exploiter la notoriété
Exemple : Un ancien concessionnaire automobile qui continue à se présenter comme un spécialiste de cette marque automobile dans des opérations publicitaires permettant la vente de véhicules de cette marque (Cass. com. 4/01/1994, n° 92-12.476)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que la notoriété d’une marque est utilisée en prétendant en être le représentant alors qu’il n’en est rien.
Exemple : Un fabricant ayant commercialisé des jeux de construction à un prix un peu moins élevé que les jeux d’un concurrent renommé et où une mention indique que les pièces sont compatibles avec le jeu concurrent (CA Versailles 14/01/1999)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que le fabricant a utilisé la notoriété et les efforts techniques et commerciaux de son concurrent pour s’accaparer sa clientèle en pratiquant des prix moins élevés.
Exemple : L’utilisation de slogans commerciaux similaires à ceux, très bien connus du public, qu’un concurrent utilise depuis 25 ans (Cass. com. 9/06/2015 n° 14-11.242)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que le concurrent use de la publicité d’un concurrent beaucoup plus connu du grand public afin de jouir de sa notoriété à son issu.
Exemple 1 : La diffusion d’une affiche reprenant le concept d’un autre auteur évoquant les tristes conséquences des accidents de la route par des images avec un fauteuil pour handicapé vide ou une peluche abandonnée (CA Paris 3/05/2000)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que le concept de base était un réel travail intellectuel et présentait une valeur économique indéniable.
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Exemple 2 : La publication d’un livre pour enfants dont la présentation intérieure et extérieure est presque identique à celle d’un ouvrage publié par un concurrent (CA Paris 19/12/2007)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que la ressemblance du livre imitant ne peut être que volontaire, et permet l’exploitation fautive de la notoriété du premier ouvrage.
Exemple : Le recrutement de plusieurs salariés d’un concurrent connaissant le savoir-faire de ce dernier (Cass. com. 8/11/2016 n° 15-14.437)
En l’espèce, il s’agit d’un acte parasitaire dès lors que les embauches ciblées ont pour but d’acquérir des procédés de fabrication pouvant concurrencer déloyalement les investissements réalisés par le concurrent.