Lors d’une de mes dernières audiences, alors que nous plaidions sur l’adultère commis par l’un des époux, la Juge aux Affaires Familiales nous a interrompu pour signifier clairement que « les choses ont évolué », à présent la faute n’est qu’un motif « comme un autre » de divorce. Il est permis de s’interroger sur le sens de cette interprétation faite par le juge.

La recherche de la faute dans le cadre d’un divorce en France peut avoir des conséquences significatives, tant sur le plan juridique que personnel. Analysons les implications et l’utilité de cette démarche en nous appuyant sur les sources fournies.

### Principes Généraux du Divorce pour Faute

En droit français, le divorce pour faute est l’une des formes de dissolution du mariage. Il repose sur la démonstration de « violations graves ou renouvelées des devoirs et obligations du mariage », rendant intolérable le maintien de la vie commune. Cette notion est bien illustrée par plusieurs arrêts de la Cour de cassation. Par exemple, le juge ne peut prononcer le divorce pour faute qu’à la condition d’énoncer que les faits retenus constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune [1][2].

### Conséquences Juridiques

1. **Prononcé du Divorce** : La recherche de la faute est cruciale pour déterminer si les conditions du divorce pour faute sont remplies. Les juges doivent vérifier si les faits reprochés constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs conjugaux. Par exemple, des excès, sévices ou injures peuvent être des causes de divorce s’ils remplissent ces conditions [3].

2. **Partage des Torts** : Lorsque les deux époux sont fautifs, le divorce peut être prononcé aux torts partagés. Les juges doivent alors inviter les parties à présenter leurs observations sur les conséquences éventuelles d’un tel divorce [4]. De plus, même en l’absence de demande reconventionnelle, le divorce peut être prononcé aux torts partagés si les débats révèlent des torts à la charge des deux époux [5].

3. **Dommages et Intérêts** : La reconnaissance de la faute peut également influencer l’octroi de dommages et intérêts. Un époux peut demander des réparations pour les conséquences d’une particulière gravité subies du fait de la dissolution du mariage, notamment lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint [6].

### Utilité de la Recherche de Faute

La recherche de la faute peut être utile dans plusieurs contextes :

1. **Établissement de la Responsabilité** : Elle permet de clarifier les responsabilités de chaque époux dans l’échec du mariage, ce qui peut être important pour la partie lésée.

2. **Conséquences Financières** : La faute peut avoir des répercussions sur les aspects financiers du divorce, notamment en matière de dommages et intérêts. Mais il ne faut pas s’attendre à des condamnations lourdes, de plus en plus, les montants de Dommages-intérêts sont mesurés sauf si les faits sont d’une gravité singulière.

3. **Satisfaction Morale** : Pour certains époux, obtenir la reconnaissance officielle des torts subis peut constituer une forme de réparation morale. Mais cela reste encore une fois très symbolique.

### Limites et Alternatives

Cependant, la recherche de la faute peut également avoir des inconvénients :

1. **Complexité et Durée** : Les procédures de divorce pour faute peuvent être longues et complexes, nécessitant la preuve des faits reprochés.

2. **Conflit et Tension** : Cette démarche peut exacerber les conflits entre les époux, rendant la procédure plus douloureuse et difficile. Il faudra y réfléchir posément surtout en présence d’enfant.

3. **Alternatives** : Le droit français offre des alternatives moins conflictuelles, comme le divorce par consentement mutuel ou pour altération définitive du lien conjugal. Ces formes de divorce peuvent être plus rapides et moins traumatisantes pour les parties impliquées.

En conclusion, la recherche de la faute dans un divorce peut être utile pour établir la responsabilité et obtenir des réparations, mais elle comporte également des inconvénients significatifs. Les époux doivent peser soigneusement ces aspects avant de choisir cette voie, en tenant compte des alternatives disponibles qui pourraient offrir une résolution plus sereine et rapide de leur situation.

### Sources
1. Cour de cassation – 94-21.923 / Cour de cassation – 1997-07-09
2. Cour de cassation – 93-13.773 / Cour de cassation – 1995-10-25
3. Cour de cassation – 67-12.003 / Cour de cassation – 1968-05-22
4. Cour de cassation – 89-14.413 / Cour de cassation – 1991-01-16
5. Article 245 / Code civil
6. Article 266 / Code civil