Dans une décision de février 2018, les juges de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence ont confirmé que la portée de la cession des droits d’auteur ne saurait couvrir des actes de reproduction sur des supports non préalablement mentionnés.
L’affaire opposait un photographe professionnel à une agence de communication. Le photographe avait cédé à l’agence, moyennant un prix forfaitaire, ces droits d’auteur pour l’une de ces photos destinée à illustrer la plaquette commerciale et le site internet d’un programme immobilier. Aucun contrat de cession n’avait été signé entre les deux parties mais une facture émise par le photographe comportait la mention « droits d’auteur pour l’utilisation d’une photographie pour illustrer la plaquette commerciale et le site internet du programme immobilier à Saint Tropez. Format double page + reprise sur internet tirage 1000 ex« .
Le photographe ayant appris que sa photographie avait également été utilisée dans d’autres parutions, sans son autorisation et sans rémunération supplémentaire, il assigna l’agence sur le fondement des articles L 111-1, L 111-3 et L 131-1 du code de la propriété intellectuelle.
Pour sa part, l’Agence faisait valoir que la cession de droits portait sur l’illustration du programme immobilier, sur internet et sur support papier, ce qui l’autorisait à l’utiliser dans des annonces de presse pour le même objet. Elle précisait en outre que le prix forfaitaire fixé était un montant élevé pour ce type de photographie, ce qui lui permettait d’apprécier l’étendue des droits cédés, plus large que celle envisagée par le photographe. Enfin, selon elle, la facture émise par le photographe ne pouvait constituer une preuve du champ de la cession de ses droits d’auteur.
La Cour d’appel réforme le jugement déféré et condamne l’agence.
Elle reconnaît qu’en l’absence de contrat écrit préalable, la facture émise par le photographe et acceptée par l’agence, définit strictement l’étendue des droits cédés.
Elle précise ensuite que la cession porte, conformément aux termes de la facture, seulement sur l’illustration d’une plaquette commerciale et sur le site internet du programme immobilier (« format double page + reprise sur internet tirage 1000 ex »). L’annonce presse n’étant pas mentionné dans la facture, les juges estiment que « l’utilisation de la photographie dans la revue XXX outrepasse l’autorisation donnée ».
Les juges soulignent enfin que le critère du montant des droits d’auteur ne permet pas d’établir la portée de la cession des droits d’auteur.
Ainsi, la Cour d’appel fait une application prévisible de l’article L.131-3 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel « la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée ». Il faut donc apprécier strictement la portée des cessions suivant le principe selon lequel tout ce qui n’est pas expressément cédé reste la propriété exclusive de l’auteur.
A RETENIR : il est primordial d’établir un contrat préalable de cession de droits dans lequel est défini de manière détaillée l’étendue de la cession pour chacun des droits cédés.